UNE NOUVELLE AUTO
Installé dans notre château de 18 pièces, je commençais à mieux organiser ma stratégie artisanale avec quelques contrats de maintenance pour de grands magasins très connus.
Un jour que je rentrais à mon domicile, et c’est peu dire "je rentrais" car ma clientèle s’étalait sur un périmètre de plus de 50 kms à la ronde de mon atelier, un jour donc que je rentrais, je ressentis des secousses dans la voiture. C’était une vieille voiture qui avait déjà plus de dix ans et le compteur avait arrêté d’inscrire le nombre de kilomètres depuis longtemps (elle voulait probablement cacher son âge !).
Les soubresauts étaient de plus en plus rapprochés et une fumée blanchâtre semblait s’échapper de dessous mon capot avant. Je compris de suite le problème et j’évaluais déjà la somme à débourser, soit pour réparer un joint de culasse, soit pour changer de voiture, car en fait, je n’avais pas l’argent nécessaire. Quant à obtenir un crédit avec une entreprise de seulement 5 mois d’existence, il ne fallait pas rêver !
Toutefois, dans mon désarroi, je m’adressais à Dieu comme j'avais l'habitude de le faire. Dans ma relation personnelle avec mon Dieu, j'avoue que je ne sais pas quand commence la prière et où fini la discussion. En fait, ou je prie tout le temps ou je lui parle tout le temps. De plus, comme c’est une habitude, je n'adopte pas une position particulière pour prier. Seule exception à cela, le culte du dimanche où je ressens le besoin d'être très concentré.
Je demandais alors à Dieu, mon Père Céleste qui est toujours, toujours à mon écoute (si d'aventure de tels propos suscitent en vous de la jalousie, sachez que rien ne vous empêche d'en faire autant et Il vous écoutera tout autant !), je lui demandais : Qu’est-
J’étais encore très loin de chez moi, en rase campagne et, sur cette route étroite, la seule habitation visible de loin semblait être une ferme.
J’entendis très distinctement dans ma tête cette douce voix qui me dit : Tourne ici !
Effectivement, un petit chemin semblait se diriger vers cette ferme. Je n'entrevoyais pas trop ce que je pouvais espérer de la part de fermiers, mais je me disais que, peut-
J’avoue que je demandais confirmation au Seigneur en m’engageant sur ce chemin qui faisait plus de deux kilomètres.
La réponse ne se fit pas attendre et… la surprise non plus !
J’entrais par l'arrière de la ferme, dans une cour remplie de voitures, garées, entassées, démontées, retournées et là, à ce moment précis, la mienne, dans un dernier sursaut, rendit l’âme, bloquée sur place. Elle laissait s’échapper de dessous le capot un nuage de fumée.
Un bonhomme, dans un bleu de travail, me regarda et, en hochant la tête, me fit comprendre que je devrais me résoudre à l’abandonner là, avec les épaves qui remplissaient son terrain. A mon grand étonnement, j’avais "atterri" chez un carrossier automobile.
Comment pouvais-
J’exprimais à cet homme mon étonnement sur le fait qu’aucune pancarte n'indiquait son activité et que ma panne imprévisible m’avait "conduit" chez lui.
Il leva alors le capot de ma voiture et là, le diagnostic fut implacable ! La faire réparer coûterait beaucoup trop cher.
Je lui demandais donc s’il pouvait me dépanner avec un véhicule d’occasion avec un prix correspondant à mes moyens… c’est à dire pour presque rien !
Il me montra une Renault 4L dont l’herbe avait atteint les rétroviseurs et nous eûmes beaucoup de peine à ouvrir les portes. Lorsqu'il ouvrit la porte arrière, tout en me vantant le volume du coffre, je voyais l’herbe et le sol à travers les poutres de bois qui "habillaient" le plancher ou du moins, ce qu’il en restait. C’était, en quelques sortes, une décapotable par le plancher, on pouvait voir la route sous la voiture !
Je n’oubliais pas de remercier le Seigneur et, à ce moment là, je me suis rappelé que c'était avec un pincement au cœur que j’avais dit : Merci Père, même si elle ne me plait pas, je l’accepte car elle me vient de Toi !
Le brave homme m'assura que, une fois remise en état, j’en serais pleinement satisfait. Je me retournais pour le suivre à son bureau pour signer les papiers lorsque, tout à coup, une énorme voiture Break freina pile devant moi. Elle avait bien failli me heurter et la conductrice sortit de la voiture, confuse et se confondant en excuses.
Pendant que son mari déchargeait le coffre rempli des pièces détachées que sa femme avait ramenées, je restais en extase devant cette magnifique voiture en pensant que, plus tard, se serait une semblable que je m’achèterais.
Je tournais autour de cette merveilleuse voiture en scrutant tous les détails de l’intérieur. Le bonhomme me suivait des yeux et il semblait vouloir me dire quelque chose. En effet, au bout de quelques instants, il me dit qu’étant donné que j’étais peintre en lettres (je m'étais bien sûr présenté), il pourrait avoir besoin de mes services. Ayant remarqué mon évident intérêt pour son break, il me confia que, à court terme, il envisageait d'investir dans des travaux publicitaires pour son affaire et suggéra que nous trouvions un terrain d'entente… publicité contre break !
La joie de ce qui parvenait à mes oreilles me fit bondir le cœur. Pourtant, je fis mine de rien, mais mon âme faisait des bonds et louait Dieu de toute sa force.
Arrivé à son bureau, je ne laissais surtout rien paraître de mon grand intérêt pour cette auto, du moins j'essayais, de peur qu’il n'en surestime sa valeur.
Mais, cette voiture avait une histoire. Elle avait appartenu à un garde champêtre qui en avait payé la moitié et, ne pouvant plus assumer son crédit, elle lui avait été saisie pour une moindre somme selon sa côte à l'argus.
Nous trouvions alors un arrangement pour un panneau publicitaire sur la route, un autre sur son bâtiment et le solde de la voiture en 6 traites étalées sur 6 mois.
Et me voici donc repartant sur ce petit chemin par lequel le Seigneur m’avait amené jusqu’à cette carrosserie, tout simplement pour que je change ma voiture et, pas pour n’importe quelle autre, mais pour celle dont je rêvais en secret, une CX Break.
J’avais l’impression de piloter un avion tant elle était souple et spacieuse. Je n’entendais pas le moteur, mais il y avait une raison… je chantais tellement fort ma joie en conduisant !